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Le projet ASSET

AgrobiodiverSity for a food-Secure planET

L’objectif du projet ASSET est d’évaluer le rôle de la diversité cultivée pour stabiliser la production alimentaire et les revenus des agriculteurs dans un contexte climatique de plus en plus variable et extrême.
ASSET (2018-2022) est un projet financé par le Programme français Investissement d’Avenir, soutenu par la Région Occitanie, MUSE et l’INRAE.


La hausse des températures et les événements extrêmes des dernières décennies ont endommagé les récoltes. Combinés aux conditions socio-économiques, démographiques et politiques des pays, les impacts du climat sur la production alimentaire ont accru la pauvreté et aggravé l’accès à des aliments nutritifs pour de nombreuses personnes dans le monde. Les projections climatiques suggèrent que ces impacts et leurs coûts humains vont s’aggraver, rendant encore plus complexes de nombreux problèmes actuels dont la pauvreté, la malnutrition et les mouvements de populations.

L’ampleur des défis posés par un climat plus variable sur la sécurité alimentaire mondiale souligne la nécessité d’explorer des politiques et des actions susceptibles de promouvoir des systèmes alimentaires robustes. Le projet ASSET contribue à cet effort.

A l’échelle gouvernementale, plusieurs outils sont proposés pour maintenir la sécurité alimentaire face à l’instabilité du climat : compenser les pertes locales par l’utilisation des réserves de grain et des marchés mondiaux, augmenter et stabiliser des rendements par l’irrigation, l’utilisation d’engrais et des variétés améliorées. Cependant, les niveaux des ressources en eau, le temps nécessaire pour développer des nouvelles variétés, les difficultés de sélectionner pour des rendements plus stables dans le temps et les coûts économiques de telles solutions, limitent leur potentiel pour construire, à elles seules, des systèmes agricoles robustes applicables dans toutes les contextes socio-économiques.


Delphine Renard (PI de ASSET) a récemment montré le potentiel d’une stratégie complémentaire mais sous-évaluée, pour faire face aux impacts de la variabilité du climat sur la production. Cette stratégie est basée sur la diversité des espèces de plantes cultivées (voir l’article publié ici [lien]). Cette diversité fait partie de ce qui est appelé l’agrobiodiversité, qui comprend la biodiversité des plantes et des animaux sauvages et domestiqués qui soutient le fonctionnement des agroécosystèmes. De nombreuses études montrent qu’augmenter la diversité taxonomique, fonctionnelle et génétique dans les écosystèmes naturels (prairies, forêts etc.) mène à une plus grande stabilité de la productivité de ces écosystèmes dans le temps, y compris face aux sécheresses. Cependant, ces liens diversité-stabilité sont beaucoup moins bien connus dans les agroécosystèmes, alors qu’ils ont une importance clé pour le maintien de la sécurité alimentaire des sociétés face au changement climatique.

Les résultats de l’étude menée par D. Renard montre qu’une plus grande diversité d’espèces cultivées au sein des pays mène à une plus grande stabilité de la production alimentaire, en particulier face aux variations interannuelles des précipitations. Cette plus grande stabilité est reflétée par une réduction forte de la probabilité de pertes soudaines des récoltes. Ces résultats montrent que la diversité en agriculture pourrait être un instrument pour stabiliser la production alimentaire face à un climat de plus erratique. Ces résultats complètent la liste des multiples bénéfices écologiques et sociaux déjà connus de la biodiversité dans les agroécosystèmes pour la nutrition et la santé humaine, la régulation des ravageurs et des maladies, la pollinisation, la productivité et la fertilité des sols.

Enfin, des études en ethnoécologie montrent que les communautés locales et les peuples autochtones ont développé des connaissances pour détecter des aléas climatiques et des stratégies pour limiter leur exposition et les risques de ces aléas sur leurs moyens de subsistance. L’adaptation aux variations climatiques n’est donc pas nouvelle pour ces communautés confrontées à un climat souvent naturellement variable qui caractérise en particulier les régions tropicales. Les stratégies d’adaptation incluent l’utilisation de l’agrobiodiversité (intégration de nouvelles variétés ou espèces, changements etc.). Malgré une reconnaissance croissante de l’importance des savoirs locaux (Local Ecological Knowledge ou Traditional Ecological Knowledge) pour l’adaptation aux conditions climatiques futures, leur contribution reste sous-évaluée et encore mal intégrée aux projets de recherche.

Des scientifiques de multiples disciplines s’accordent sur un principe : l’agrobiodiversité—à différents niveaux d’organisation, échelles spatiales et temporelles—est un élément essentiel pour la mise en place d’agroécosystèmes plus durables et résilients aux changements climatiques.

Pour que l’agrobiodiversité puisse être utilisée pour soutenir l’adaptation des sociétés aux changements climatiques et stabiliser la production alimentaire , de nouvelles connaissances sont nécessaires pour mieux comprendre comment exploiter les bénéfices de l’agrobiodiversité.

C’est l’objectif du projet ASSET 


Relations diversité-résilience:
Mécanismes et échelles spatiales

WP1

Nous testerons l’hypothèse « d’assurance de la diversité ». Son principe est le suivant: dans un système diversifié, la mauvaise récolte d’une espèce (ou variété) peut alors être compensée par la récolte d’autres espèces, stabilisant ainsi la production totale dans le temps. L’effet d’assurance repose sur le fait que différents génotypes ou phénotypes varient dans leurs réponses aux conditions environnementales.

Des mesures de terrain. Des mesures d’agrobiodiversité, de production et de climat ont débuté en 2019. Ces mesures, répétées sur les trois années du projet permettront de tester les mécanismes des liens entre agrobiodiversité-productivité-résilience, à l’échelle des variétés et des espèces cultivées, de la parcelle au paysage, sur trois terrains d’étude. 

La modélisation statistique sur la base de données agricoles, environnementales et socio-économiques historiques de sources diverses (e.g. gouvernementales, internationales). Nous approchons les mécanismes par le biais du calcul d’indices mathématiques issus de l’écologie théorique permettant d’approximer ces mécanismes et leur importance relatives à de multiples échelles spatiales.

La modélisation mathématique permet de simuler la productivité et stabilité de paysages variant dans leur distribution spatiale et temporelle de l’agrobiodiversité (espèces, variétés). Ces modèles permettent de soumettre ces mosaïques paysagères à différents aléas climatiques et de pressions de pathogènes.

Utilisation de la diversité par les agriculteurs face aux variations climatiques

WP2

Nous nous intéressons aux trajectoires de changements individuels et collectifs des représentations, usages et pratiques de l’agrobiodiversité, en lien avec le climat mais aussi d’autres facteurs de risque liés à leur environnement biophysique, sociale et économique.
Nos travaux dans cet axe sont encrés sur trois sites d’étude.

Diverses méthodes issues de l’ethnoécologie, de l’anthropologie, dont l’observation participante, des entretiens ouverts et semis directifs, des questionnaires, et des ateliers de groupe.Nos approches privilégient l’immersion prolongée et la participation à la vie quotidienne des agriculteurs pour une compréhension fine des interactions et des enjeux sociaux et culturels liés à l’agrobiodiversité.

La cartographie par l’utilisation des Systèmes d’Informations Géographiques (SIG) permettra d’identifier les parcelles des ménages d’agriculteurs, de spatialiser l’agrobiodiversité et d’y associer des données systématiques (sur le sol, le foncier etc).

Réseaux sociaux d’échange

r

Chercheurs impliqués dans le WP2 : Antoine Doncieux, Marilou Demongeot, Yildiz Aumerruddy-Thomas, Sophie Caillon


Les recherches de notre équipe permettent de compléter les connaissances actuelles sur trois plans:

Stabilité temporelle et rendements moyens. Malgré son importance pour la sécurité alimentaire, la stabilité temporelle de la production agricole a fait l’objet de beaucoup moins d’études empiriques que les liens entre la diversité et les rendements moyens. Le WP1 du projet contribuera à améliorer les connaissances dans ce sens.

Une recherche focalisée sur quatre espèces cultivées. Les études des impacts des changements climatiques sur la production agricole se limitent principalement à quatre espèces : le blé, le maïs, le riz et le soya. Ces analyses donnent une image très incomplète de la diversité des espèces cultivées en particulier par les petits agriculteurs qui en Afrique, Asie et Amérique Latine produisent plus de 70% des calories consommées. Cette diversité ainsi que sa gestion, ses usages et multiples valeurs sociétales sont donc largement ignorées dans les recherches liant sécurité alimentaire et les changements climatiques.

La prise en compte des savoirs locaux. Les savoirs locaux bénéficient désormais d’une reconnaissance par la Convention pour la Diversité Biologique et par la Plateforme Intergouvernementale sur la Biodiversité et les Services Ecosystémiques (IPBES). De plus, un nombre croissant d’études mettent en évidence la contribution des savoirs locaux dans une diversité de domaines de recherche, notamment sur le changement climatique. Ces travaux plaident en faveur de « l’approche par les évidences multiples» que nous adoptons dans ASSET. Cette approche met en avant la complémentarité entre les différents systèmes de savoirs scientifiques et locaux, ainsi que la nécessité de favoriser de dialogue entre eux pour répondre aux grands enjeux de société, dont fait partie l’adaptation au changement climatique.

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